Salaire ou dividende : comment optimiser sa rémunération en Suisse ?
Lorsqu’un entrepreneur possède sa propre société de capitaux en Suisse (SA ou Sàrl), une question revient souvent : comment se verser la meilleure rémunération possible ? Faut-il augmenter son salaire ou plutôt recourir à des dividendes ?
Derrière cette interrogation se cachent des enjeux complexes qui touchent à la fiscalité (tant de l’entreprise que de l’actionnaire), aux charges sociales (AVS, AI, ALV, 2ème pilier) et à la sécurité financière sur le long terme.
Du point de vue de l’entreprise, un salaire supplémentaire est déductible du bénéfice imposable, mais génère des cotisations sociales élevées. À l’inverse, un dividende n’entraîne aucune cotisation AVS ou LPP, mais n’est pas déductible dans les comptes, ce qui accroît l’impôt sur le bénéfice.
Cependant, côté fiscal, la Suisse pratique une “imposition partielle” des dividendes pour les actionnaires détenant une participation qualifiée (au moins 10 % du capital), ce qui réduit la facture d’impôts pour l’associé.
Pour optimiser la démarche, de nombreux entrepreneurs genevois, ou d’ailleurs, s’adressent à un expert-comptable suisse ou une fiduciaire tel que Karpeo afin d’analyser leur structure de rémunération idéale. Car au-delà des chiffres, il faut préserver un salaire de base cohérent pour cotiser à la prévoyance (LPP) et éviter toute requalification d’un dividende excessif en salaire par l’AVS.
Cet article se propose de détailler ces mécanismes, d’illustrer la balance salaire–dividende, et d’offrir des pistes concrètes pour un arbitrage optimal entre charges sociales, fiscalité et sécurité de l’entrepreneur.
Avant d’explorer en détail les différences entre salaire et dividende, prenez quelques minutes pour découvrir notre vidéo. Elle vous offrira une vue d’ensemble sur ces deux modes de rémunération et leurs impacts en Suisse.
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Pourquoi choisir entre salaire et dividende ?
En Suisse, le dirigeant d’une SA ou d’une Sàrl peut cumuler les casquettes d’associé (actionnaire) et de salarié (administrateur ou gérant). De ce fait, il peut tirer un revenu de deux sources principales :
Le salaire
Le salaire est considéré comme une charge de personnel pour l’entreprise, donc déductible de son bénéfice imposable. Il subit intégralement les cotisations sociales (AVS/AI, ALV, allocations familiales, LAA, LPP) et l’impôt sur le revenu personnel.
Le dividende
Le dividende est versé à partir des bénéfices déjà imposés de la société, non soumis aux cotisations sociales. L’actionnaire bénéficie d’une imposition partielle s’il détient ≥10 % du capital (seule une fraction, souvent 50 à 70 %, du dividende est imposable). Cela réduit la double imposition économique, mais supprime également l’effet cotisant sur la prévoyance.
Ce choix revêt une dimension stratégique. Un salaire plus élevé renforce la protection sociale (LPP, etc.) et diminue l’impôt sur le bénéfice de la société, tandis que le dividende allège le poids des charges sociales mais se heurte à l’impôt sur le bénéfice, puis à un impôt partiel au niveau de l’associé.
À Genève comme dans d’autres cantons, l’accompagnement d’un expert-comptable s’avère souvent judicieux pour calculer le gain ou la perte potentielle. Voici un tableau récapitulatif pour comparer les avantages et inconvénients du salaire et du dividende en un coup d’œil :
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Salaire soumis à l’AVS, ALV et LPP
Lorsqu’un entrepreneur augmente son salaire, la société paie des cotisations patronales (environ 12 à 15 % du montant brut, incluant la part employeur AVS/AI/APG, ALV, allocations familiales, assurance accident, part employeur LPP…).
De son côté, le dirigeant subit des cotisations salariales (environ 6 à 8 % du brut pour AVS/ALV + sa part LPP), ce qui réduit le net perçu. En pratique, sur 50’000.- CHF de salaire additionnel, il n’est pas rare que le dirigeant ne reçoive qu’entre 42’000.- CHF et 45’000.- CHF avant impôt sur le revenu, le reste allant aux assurances sociales.
Pour la prévoyance, un salaire plus élevé signifie cotiser davantage à la LPP (2ème pilier).
Cela se traduit par :
- Un avoir de retraite supérieur.
- Une meilleure couverture en cas d’invalidité ou de décès, car les prestations LPP se calculent sur la base du salaire assuré.
- La possibilité de réaliser des rachats dans la caisse de pension, déductibles fiscalement, afin de renforcer encore plus son épargne 2ème pilier (stratégie appréciable si l’on vise à diminuer son revenu imposable).
Dividende non soumis aux cotisations
Le dividende échappe totalement à l’AVS et à la LPP. Autrement dit, l’associé ne paie aucune cotisation sociale sur ces sommes. Dans l’immédiat, cela économise plusieurs milliers de francs sur chaque tranche de dividende, et allège aussi la société qui n’a pas de part patronale à verser sur ces 50’000.- CHF.
En revanche, on ne crédite rien à la retraite LPP du dirigeant. De plus, un salaire trop faible par rapport aux dividendes peut engendrer une requalification : les caisses AVS genevoises (ou cantonales) peuvent juger qu’une partie du dividende doit en réalité être traitée en salaire, si celui-ci apparaît artificiellement bas. Ce point doit être surveillé attentivement avec son fiduciaire ou “conseiller expert-comptable” pour respecter l’usage sectoriel.
La fiscalité : impôt sur le bénéfice et impôt sur le revenu
Déductibilité du salaire
Un salaire supplémentaire est déductible du bénéfice imposable de la société. Si la société fait 50’000.- CHF de bénéfice, et qu’elle utilise cette somme pour rehausser le salaire du dirigeant, elle peut ramener le bénéfice à 0 et donc ne payer aucun impôt sur les sociétés. Dans un canton comme Genève, le taux d’impôt société (fédéral, cantonal, communal combiné) avoisine 14 à 16 %, ce qui ferait économiser ~7’000.- CHF sur 50’000.- CHF de bénéfice.
Dividende et imposition partielle
Si la société conserve son bénéfice (50’000.- CHF) et le distribue en dividende, elle s’acquitte d’abord de l’impôt sur le bénéfice (disons ~14 % = 7’000.- CHF). L’associé reçoit 50’000.- CHF bruts de dividende, sur lesquels un impôt anticipé de 35 % est prélevé (17’500.- CHF), remboursé ensuite si l’associé déclare le dividende à son nom. Au niveau de l’impôt sur le revenu, la Suisse applique une “imposition partielle” : par exemple, le canton n’impose que 70 % du dividende si l’associé détient ≥10 % du capital. Cela donne un abattement effectif de 30 %.
À titre d’illustration, si le dirigeant est dans une tranche marginale de 30 %, il paiera 0,3 × 70 % × 50’000.- CHF = ~10’5000.- CHF d’impôt sur le dividende. Le net final (après restitution de l’impôt anticipé et règlement de l’impôt sur le revenu) s’avère souvent un peu plus élevé que si l’on procédait via le salaire, notamment parce qu’aucune cotisation sociale n’est intervenue.
Salaire et amélioration de la LPP
En Suisse, la LPP (2ème pilier) s’applique sur la partie du salaire excédant la “déduction de coordination” (~25’000.- CHF) jusqu’à ~88’000.- CHF pour la partie obligatoire, pouvant aller plus haut pour la partie surobligatoire. Un dirigeant au salaire de 150’000.- CHF cotise beaucoup plus qu’à 100’000.- CHF. Cela augmentera son capital de retraite. De plus, s’il y a des lacunes de prévoyance, il peut faire des “rachats LPP” et économiser sur l’impôt.
Un expert-comptable basé à Genève peut conseiller un chef d’entreprise sur la marge de rachat, la déduction fiscale possible, et le timing optimal (par exemple, étaler les rachats sur plusieurs années pour réduire l’impôt successif).
Dividende : pas de cotisation, besoin d’épargne personnelle
Un dirigeant préférant le dividende doit être conscient qu’il ne cotise pas ces 50’000.- CHF dans le système social. Il pourrait placer cet argent en 3ème pilier, en assurance-vie ou d’autres investissements personnels, mais ce ne sera pas protégé de la même façon que la LPP (exonérée d’impôt sur la fortune tant qu’elle est bloquée). Cela requiert une certaine discipline d’épargne, sinon on risque de se retrouver avec un trou de prévoyance à la retraite.
Équilibrer la sécurité et l’optimisation
La plupart des fiduciaires conseillent de maintenir un salaire raisonnable (en ligne avec la fonction, le marché, les besoins familiaux), puis de recourir aux dividendes pour la part de bénéfices supplémentaire. L’objectif est de ne pas sous-cotiser la LPP ni éveiller les soupçons de l’AVS. Cet équilibre confère généralement la meilleure combinaison, surtout pour des sociétés florissantes.
Recommandations concrètes pour un dirigeant en Suisse
Conserver un salaire de base cohérent
Le salaire doit être crédible pour les caisses sociales : ni trop faible (risque de requalification) ni exagéré (charges sociales et impôt personnel plus élevés). Il doit par ailleurs couvrir les dépenses courantes de l’entrepreneur et assurer un minimum de cotisations pour la prévoyance (AVS, LPP).
Distribuer des dividendes quand le bénéfice excède un certain seuil
S’il reste un bénéfice net confortable (par exemple 50’000.- CHF, 100’000.- CHF ou plus), il est logique d’envisager la distribution de dividendes. Les abattements offerts par l’imposition partielle se traduisent par un gain fiscal global. Il faut néanmoins prévoir l’impact de l’impôt anticipé à 35 % qui sera immobilisé jusqu’à la déclaration, et s’assurer que la société peut se permettre de vider cette trésorerie sans mettre en péril son fonds de roulement.
Envisager le levier LPP : rachats et plans surobligatoires
Si l’on souhaite diminuer l’impôt personnel, on peut simultanément augmenter son salaire (ou maintenir un certain niveau) et effectuer des rachats LPP. Ces versements sont entièrement déductibles. On bénéficie alors d’une déduction fiscale importante tout en renforçant la retraite. Un bon “expert-comptable” peut modéliser la rentabilité de ces rachats.
Attention à la requalification si le salaire est trop bas
Comme précisé, l’AVS peut considérer que la majeure partie du dividende représente du salaire dissimulé. Cela signifierait payer rétroactivement des cotisations, majorées d’intérêts de retard. Les guidelines suisses mentionnent parfois le critère “le dividende ne devrait pas dépasser 10 % de la valeur fiscale de la société” ou “le salaire doit correspondre au tarif normal pour la fonction”. Se faire conseiller par un fiduciaire expérimenté comme Karpeo aide à cerner la limite.
Vérifier sa trésorerie et ses projets d’investissement
Si la société a besoin d’investir ou de conserver des réserves, un dividende trop important n’est peut-être pas souhaitable. De même, si on projette une cession de l’entreprise dans 2 ou 3 ans, on peut vouloir laisser une partie du bénéfice pour afficher des comptes plus attractifs à l’acheteur, ou inversement distribuer pour optimiser la valeur imposable. Chaque cas est unique.
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Conclusion : la juste balance entre salaire et dividende
Le choix entre salaire et dividende est un levier majeur de planification fiscale et sociale pour un entrepreneur suisse. Les éléments clés à prendre en compte sont :
- Charges sociales : un salaire élevé signifie plus de cotisations (AVS, LPP) et donc une meilleure protection, alors que le dividende n’entraîne aucune cotisation.
- Impôt sur le bénéfice : le salaire est déductible pour la société, pas le dividende. Donc un dividende suppose un bénéfice imposé.
- Imposition partielle des dividendes : grâce à un abattement (souvent 30 à 50 %), le dirigeant ne paie pas l’impôt complet sur le montant distribué, ce qui avantage le dividende d’un point de vue purement fiscal.
- Épargner pour la retraite : un fort dividende réduit la future pension LPP ; un salaire plus élevé consolide l’épargne surobligatoire et autorise des rachats déductibles.
- Suspicion de requalification : un salaire artificiellement bas au profit des dividendes peut être sanctionné par la caisse AVS.
En pratique, la “solution classique” consiste à se fixer un salaire correct, adapté à la fonction et suffisant pour couvrir un niveau de vie normal et des cotisations convenables, puis à distribuer un dividende lorsque l’entreprise dégage des surplus.
Cette approche offre :
- Une limitation des cotisations sociales superflues sur le haut du salaire.
- Une stabilité pour l’AVS et la LPP, car on ne tombe pas dans l’excès d’un salaire trop bas.
- Une optimisation fiscale sur la partie versée en dividendes.
Enfin, avant de prendre une décision, mieux vaut solliciter un expert-comptable à Genève ou dans son canton, habitué à évaluer la répartition optimale selon le barème d’imposition, l’âge, la situation familiale, la caisse de pension disponible, etc. Les gains potentiels ou l’équilibre visé (plus de sécurité ou plus de trésorerie) diffèrent d’une personne à l’autre.
Quel que soit le choix, la clé est de maîtriser ces différents facteurs et d’opérer des ajustements au fil des années, au gré de l’évolution de l’entreprise et des besoins de l’entrepreneur.